


Comment rendre la qualité indiscutable entre Tech et Business ?
La priorité ? Que le produit tourne et que les nouvelles fonctionnalités sortent en temps et en heure… Alors pourquoi élever la qualité d’une technologie à l’état de l’art ? Padok a défini un framework de suivi de la qualité qui met Tech et Business d’accord.
Padok est la verticale DevOps du groupe M33 (Theodo, BAM, Sicara, Sipios...), ils accompagnent les grands groupes et scale-ups sur leurs problématiques d’infrastructure : souveraineté, sécurité, performance, devX (l’expérience du développeur). Améliorer la qualité des infrastructures des clients, c’est leur dada. Depuis un an, ils ont développé ROSE, un framework qui mesure la qualité d’une infrastructure, acronyme de Résiliente, Opérable, Sécurisée, Empowering. Le résultat obtenu a dépassé leurs attentes : réduction du nombre de bugs, augmentation de la satisfaction client, engagement des équipes tech, etc. Si bien que l'indicateur est désormais suivi en board. J’ai interrogé Aurore Malherbes, CTO co-fondatrice et Clément David, CEO co-fondateur de Padok qui nous partagent leurs retours d’expériences, et pourquoi bon nombre d’entreprises devraient faire de la qualité une priorité...
A noter, nous abordons ici la notion de qualité d’une infrastructure informatique, un prochain article abordera la qualité du code et des librairies avec Maxime Thoonsen qui nous présentera le framework 3S de Theodo ce qui permettra d’aborder de manière globale cette notion de qualité d’un asset technologique.

Pourquoi la notion de qualité est-elle si importante pour un développeur ?
Aurore : il faut comprendre que la qualité est une notion abstraite à laquelle les développeurs sont très sensibles. Elle dépend de leur formation, expérience et sensibilité… Pour l’expliquer, j’aime bien comparer le métier de développeur à celui d’artisan. Ce sont deux métiers dont le scope va de la conception à la réalisation. Un bon artisan a le souci du détail et aime que sa création dure dans le temps. C’est la même chose pour un développeur. Cependant, à moins de travailler pour les mobiliers de France, nécessitant ce travail d’orfèvre 🙂, l’artisan ne sera pas toujours mobilisé sur des chantiers haut-de-gammes. On peut lui demander de faire plus vite, avec des matériaux moins nobles, ce qui sera moins beau et moins durable mais qui correspondra davantage aux enjeux du donneur d’ordre.
“C’est quoi une infrastructure de qualité ? En posant la question à 10 ingénieurs, tu auras 10 réponses différentes.”
Qu’est ce qui a déclenché l’ouverture de ce chantier ?
Clément : il y a eu une concomitance d’événements. Premièrement, l’entreprise était en pleine croissance, on pouvait avoir 10-15 ingénieurs qui déployaient chez le clients mais chacun le faisait à sa manière. Le monitoring de l’activité devenait de plus en plus difficile. De plus, on a commencé à faire de l’infogérance, c'est-à-dire à s’occuper de l’infrastructure de nos clients 24h/24 et 7jours/7. On était déjà très fier de notre travail mais il devenait indispensable d’avoir une vue globale des interventions et de la qualité des infrastructures sur lesquelles on travaillait.
Aurore : Par ailleurs, chaque semaine, un questionnaire client évalue la vitesse et la qualité d’accompagnement de notre travail. Au débrief on ne parlait que de delivery, ce qui a commencé à générer de la frustration, surtout chez les techs seniors. Ça a été un signal d’alerte pour moi. Je ne voulais pas voir partir ces personnes clés et j’ai décidé d’être proactive sur le sujet.
“Padok a une forte culture tech, mettre en place un framework de qualité et valoriser l’invisible est en phase avec nos valeurs”
Aurore, Clément, si on se met à la place de chaque protagoniste, quel est l’intérêt de faire de la qualité et de mettre en place un framework ?
Aurore : du point de vue de l'équipe tech, le framework apporte un cadre de travail vertueux. D’une part, l’ingénieur voit son travail évalué, ce qui lui apporte de la reconnaissance et lui donne l’opportunité de progresser. Cette évaluation permet d’améliorer la qualité des infrastructures sur lesquelles nous travaillons, et de manière générale, les développeurs apprécient de travailler sur une infrastructure de qualité. D’autre part, le framework apporte un langage commun à la tech et au business. L’ingénieur dispose d’arguments pour prioriser la dette et convaincre les équipes product et sales.
“Le framework de qualité apporte un langage commun à la tech et au business”
De mon côté, en tant que CTO, le framework me permet d’avoir une vision globale et factuelle de la qualité du travail fourni. Ça me permet de mieux définir les priorités et de challenger les équipes. Par exemple, si on est déjà à 16/20 en sécurité, est-ce la priorité ? N’y a-t-il pas d’autres chantiers à approfondir avant ? Cela permet aussi d’améliorer les conditions de travail des ingénieurs, ce qui améliore la rétention.
Clément : d’un point de vue business, tu n’es pas obligé de faire de la qualité. Ce n’est pas bien ou mal, c’est une question de contexte et de choix stratégique. Une entreprise au stade du Minimum Viable Product qui cherche à démontrer sa capacité d’exécution auprès de son investisseur n’a pas forcément besoin de faire les choses dans les règles de l’art. En revanche, s’il y a des enjeux de croissances et donc de passage à l’échelle, une infrastructure de mauvaise qualité ralentit voire empêche cette expansion.
“Si c’est sous-estimé par le business et que ce n’est pas un choix stratégique, à un moment ou un autre ça aura un impact dramatique.”
Pour Padok, nous avons cette discussion avec chaque client, mais le niveau de compréhension n’est pas le même pour tout le monde. La mise en place d’un framework a permis de gagner énormément de temps. On peut dire vous êtes à tel niveau et voilà où on devrait être.

Alors, c’est quoi une infrastructure de qualité ? 🙂
Aurore : on a pas mal itérer sur la définition d’une infrastructure de qualité, il en est ressorti 4 grands items qui ont donné l'acronyme ROSE :
- Résiliente : tenir 99% du temps selon les charges prévues en termes de trafic.
- Opérable : en tant que devops, quand j'interviens, je ne vais pas faire de bétise.
- Sécurisée : ce qui est un enjeu majeur du cloud compte tenu du nombre d’attaques qui s'envolent…
- Expérience du code : les premiers utilisateurs sont les développeurs. La chaîne de développement est-elle rapide ? Trouve-t-on les bugs facilement ?
Pour être bien noté dans chaque item, ce n’est pas si simple, cela nécessite un travail de conception et de réalisation. Et nous, Padok, on doit se poser la question pour chaque client !
Plus d’informations sur le framework ROSE.

Comment as-tu construit ce framework sans en faire une machine à gaz et perdre l’adhésion des équipes ?
Aurore : j’ai procédé par étapes :
- Poser sa vision et la challenger : j’ai posé mes convictions sur une feuille blanche puis j’ai impliqué deux personnes seniors. L’objectif à ce stade, vérifier que toutes les principales notions étaient prises en compte et explicites.
- Présenter le framework à toute l’équipe : après avoir travaillé en chambre, il était nécessaire d’impliquer toute l’équipe. Recueillir le poul, les avis, pour itérer une nouvelle fois.
- Tester sur 2 projets pilotes : et là, ça n’a pas marché. Je n’ai pas eu l’adhésion attendue ! Le test a révélé qu’il y avait trop de notions et trop de critères d’évaluation, le framework n’était pas exploitable en l’état. Comment réagir ?
- Passer le relais : Sasha et Guillaume, deux Site Reliable Engineering de l’équipe ont repris le sujet. Ils ont réduit le champ de critères et automatisé la saisie pour faciliter l’usage de l’outil.
L’ensemble de ces étapes a pris près d’un an. Aujourd’hui 80% des équipes utilisent le framework et l’une d’entre elle vient de développer une application dédiée pour en faciliter encore plus l’usage ! J’espère bien atteindre les 100% grâce à ça 😉
Comment as-tu accompagné tes équipes au changement ?
Aurore : Suivre la qualité des assets technologiques est tout de suite devenu un sujet d’entreprise. L’indicateur est suivi à tous les échelons de l’entreprise, du comex, à l’ingénieur qui déploie l’infrastructure. Pour cela, on a beaucoup communiqué auprès des équipes et il a fallu dédramatiser la mauvaise note ! On a des infrastructures à 38 sur 100 et c’est ok, l’objectif est d’évaluer pour faire progresser le client dans sa note.
Le mot de la fin, pourquoi toute entreprise technologique devrait en prendre de la graine ?
Aurore : “mettre la qualité au même niveau que le delivery apporte un engagement des équipes considérable”
Clément : “mesurer la qualité permet de régler les sujets de discordes entre Tech et Business, mettre la qualité au cœur des discussions rend un grand service à l’ensemble de l’entreprise.”